lundi 6 mars 2006

Inculte


Dans son dernier numéro (janvier 2006), Inculte, revue littéraire et philosophique, propose un dossier sur "la récupération". Pas d'hystérie ici. Les textes sont retenus. Il y a de la détermination réformiste dans cette revue, mais le docte ton de certains passages peut agacer, notamment dans l'introduction. Exemple : "la récupération est la répétition en tant qu'elle altère la proposition d'origine, qu'elle la recontextualise dans une économie différente de celle de son énonciation ou de sa présentation premières." Ici ça sent les fiers diplômes, la prison universitaire et les années passées à policer une thèse. Heureusement, un peu plus loin, un texte de Mathias Enard détourne avec malice les formes du discours universitaire.

On lit dans Inculte des choses respectables. La revue défend le droit à l'interprétation, à la récupération, et tape avec précision sur le concept d'idée originelle, idée "à l'abri des autres", vieille lune de tous les fanatiques et autres adorateurs de dadame pureté. Olivier Rohe écrit : "Il n'y a que des copies, des idées imbriquées les unes les autres, un tas de broussaille indémêlable. La paternité d'une pensée n'est que fiction. Les idées naissent sous X." Puis, concluant son article, il dit : "La déploration de la récupération qui se joue sur le terrain de l'interprétation et de la trahison, démontre une domestication de la vie. Ne pas tolérer des interprétations non conformes; sanctionner la circulation et prévenir le risque du dévoiement; déplorer l'existence du temps et le vivre sous le signe de la rétention : toutes ces postures qui motivent le procès de la récupération n'expriment, in fine, qu'une passion triste. Une passion pour l'ordre." Là on se dit qu'on a bien fait d'ouvrir Inculte.

On trouve plein d'autres choses dans Inculte, la réédition d'une interview de JG Ballard, un "Manifeste pour un cinéma violent", de 1968, signé Philippe Garrel, et deux textes de fiction. Courez chez les incultes.
zéro011

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