vendredi 2 février 2007

Rotor




Le Rotor est le nom d'une machine de fête foraine, inventée par l'ingénieur allemand Ernst Hoffmeister, et présentée pour la première fois au public lors de l'Oktoberfest de 1949. Très populaire dans les parcs d'attraction des années 50, le Rotor offre des sensations fortes. Soufflé par l'effet d'une force centrifuge, vous êtes collé au mur, vous ne sentez plus le sol sous vos pieds, la tête en bas, en haut, les jambes en l'air, les pieds dans la tête de votre voisin, assis, debout... Vous êtes un cosmonaute de foire. Comme si vous vous agitiez dans une essoreuse à salade. L'aspect extérieur du Rotor, toujours très festif et bariolé, a peu évolué avec le temps, comme en témoigne cette galerie de photographies.

On trouve également trace du Rotor dans Les Quatre cents coups, le film de François Truffaut sur l'enfance (1959). Dans une scène, le jeune Antoine Doinel, accompagné par Truffaut lui même, va s'amuser dans le Rotor. Les critiques ont vu dans cette scène une métaphore du cinéma. C'est comme si l'enfant, accompagné de son double le cinéaste, entrait dans un praxinoscope ou un zootrope ou phenakistiscope, ces machines manuelles du XIXe s., qui permettaient de créer l'illusion du mouvement à partir d'une série d'images fixes et préfiguraient l'arrivée du cinématographe. Les deux personnages ne font plus qu'un: l'ego-baudruche peut alors se dégonfler. Le rotor permet enfin au je d'être un autre.

De la même manière, le mot "rotor", lorsqu'on inverse le sens de ses lettres, s'ouvre et tourne sur lui même, comme tout bon palindrome. Comme si on arrivait, grâce à la ritournelle du Rotor, à effleurer un point où s'abolissent les contraires. Ce fameux point dont André Breton parlait dans son Second manifeste du surréalisme : “Tout porte à croire qu’il existe un certain point de l’esprit d’où la vie et la mort, le réel et l’imaginaire, le passé et le futur, le communicable et l’incommunicable, le haut et le bas cessent d’être perçus contradictoirement". Après tout, et s'il suffisait d'aller faire un tour dans une fête foraine pour trouver ce point. On ne sait jamais. Rendez-vous au Luna Park le plus proche de chez vous.
zéro011

1 commentaire:

Anonyme a dit…

J'ai connu ce manege et j'adorais ça. Merci pour cette belle évocation. A bientôt.